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Point de vue prospectif sur l’Afrique – Le mouvement audacieux de l’Afrique en direction de l’intégration: l’accord de libre-échange continental

Editor's note:

Note de l’éditeur: vous trouverez ci-dessous un point de vue extrait du chapitre 1 du rapport Foresight Africa 2018. Il développe six thèmes fondamentaux offrant à l’Afrique des opportunités de surmonter ses obstacles et de favoriser une croissance inclusive. Lire le chapitre complet sur le leadership africain ici. Ce point de vue a été publié à l’origine le 11 janvier 2018. Le 21 mars, la ZLEC a été officiellement signée par 44 pays africains. The English version of this piece can be found here.

Après avoir traversé une année 2016 tumultueuse, les économies africaines ont clos 2017 sur une note positive, avec un taux de croissance annuel de 2,6 pourcent prévu continuer son mouvement haussier en 2018 et par la suite. Un certain nombre de pays d’Afrique affichent un taux de croissance de plus de 6 %, en résultat de la forte augmentation des apports d’investissements directs étrangers. Les prix des matières premières ont poursuivi leur reprise en 2017 et la croissance et le commerce mondiaux prennent de l’élan. 

Ce vent en poupe permet au continent de voir venir 2018 sous un angle nouveau et amélioré. Les récents vents contraires ne doivent cependant pas être oubliés. Tous les pays d’Afrique, mais en particulier les pays tributaires des matières premières, ont un besoin urgent de se diversifier, de booster la valeur ajoutée et de s’industrialiser, non seulement pour surmonter les futures tempêtes économiques, mais aussi pour garantir une croissance et un développement durables et inclusifs. Les économies africaines sont également confrontées à un potentiel tsunami, lié à la potentielle hausse du nombre de jeunes au chômage et au piège démographique susceptible de bloquer la croissance des revenus par habitant, voire de creuser les inégalités.

Ces tendances expliquent pourquoi il est crucial de déployer des efforts visant à éliminer les barrières tarifaires et non tarifaires entre les pays d’Afrique afin d’impulser le commerce intra-africain. Les négociations pour l’établissement d’une Zone de libre-échange continentale (ZLEC) vont dans la bonne direction et au rythme voulu. Huit cycles de négociations ont produit de bons résultats : la date butoir de décembre 2017 a été respectée. Ce n’est plus désormais qu’une question de travaux techniques nominaux. Le Protocole relatif au commerce des services a été convenu et adopté par les Ministres du commerce africains le 2 décembre 2017. Même si ce Protocole devra être travaillé davantage au niveau des règles d’origine et de l’application des modalités convenues au titre de la libéralisation du commerce de biens (en se fixant l’objectif ambitieux de 90 pourcent). Un Sommet extraordinaire de l’Union Africaine est envisagé avant la fin du mois de mars 2018 en vue de finaliser et de signer l’intégralité de l’accord ALEC.

L’augmentation prévue des échanges commerciaux intra-africains jouera un rôle fondamental en permettant de créer des emplois décents, d’améliorer la productivité, d’augmenter les revenus et de réduire la vulnérabilité et les risques économiques.

L’ALEC offre d’importantes opportunités en matière d’industrialisation, de diversification et d’emploi en Afrique. Les pays africains échangent davantage de produits à valeur ajoutée entre eux, à la différence de leurs exportations dans le reste du monde, qui sont essentiellement des matières premières. Ainsi, les produits manufacturés représentaient en 2014 41,9 pourcent des exportations intra-africaines, soit un taux nettement plus élevé que la part de 14,8 pourcent des exportations vers l’extérieur du continent. Les échanges commerciaux intra-africains sont cependant sous-exploités en raison des coûts élevés des transactions commerciales dans la région : ils ne représentaient ainsi que 15,3 pourcent du volume total des échanges commerciaux africains en 2015. L’ALEC va changer cela. L’augmentation prévue des échanges commerciaux intra-africains jouera un rôle fondamental en permettant de créer des emplois décents, d’améliorer la productivité, d’augmenter les revenus et de réduire la vulnérabilité et les risques économiques.

Les pays d’Afrique peuvent être fiers d’avoir négocié un accord de libre-échange entre 55 pays, chacun possédant ses propres intérêts, car ce n’est pas une sinécure. La conclusion des négociations n’est toutefois que la première étape. Le véritable défi à relever en 2018 et durant les années à venir sera de mettre en œuvre l’accord. La bonne mise en œuvre de l’ALEC africain aura un impact révolutionnaire sur les économies africaines, mais exigera un solide leadership, une architecture institutionnelle efficace et inclusive, un cadre d’évaluation et de surveillance robuste et un financement innovant pour des investissements indispensables au niveau des infrastructures et de la capacité de production.

Le nouveau projet ambitieux d’accord de libre-échange continental de l’Afrique doit être suivi de près en 2018. Cet accord historique peut être décisif, car s’il est bien mis en œuvre, il viendra soutenir et renforcer le vent en poupe s’étant manifesté en 2017 et de protéger le continent contre tout vent contraire à l’avenir. Le G-20, les conglomérats africains comme le Groupe Dangote, des organisations internationales et des groupes de conseil mondiaux attirent déjà l’attention des investisseurs internationaux pour les encourager à profiter de cette opportunité africaine : un marché unique d’1,2 milliard de personnes, un PIB continental de plus de 3 mille milliards $ et une classe moyenne en pleine expansion. L’ALEC est une preuve supplémentaire que l’Afrique est une destination d’investissement privilégiée.

Remarque: pour une discussion approfondie sur les stratégies nécessaires pour assurer la pleine réalisation du potentiel de l’ALEC, voir Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique, Union Africaine et Groupe de la Banque africaine de développement (2017), « État de l’intégration régionale en Afrique VIII : vers la réalisation de la ZLEC » Addis Abbeba, Éthiopie.